A l’heure du NO-CODE, vous allez dire que je n’ai rien compris, que je suis à la « ramasse »… Mais le site que vous consultez en ce moment même a été réalisé en php/html/css à la main d’un développeur amateur. Cet exercice de codage m’amuse finalement, tout en m’aidant à mieux comprendre comment tout cela fonctionne et en faisant travailler mon vieux cerveau pour éviter la sclérose… Gageons qu’en 2025, j’aurais le courage et le temps de bloguer à de nombreuses occasions quelques contenus qui pourraient vous intéresser.
Métavers, NFT, blockchain... les médias high tech n’ont que ces mots à la « Une ». Mais que représentent-ils exactement pour les entreprises ? Christophe Cotin Valois, CEO de l’agence UX Welcome Max, spécialisée dans le marketing et l’expérience client, nous livre son regard sans concession sur ces nouveaux univers.
Comment définiriez-vous un métavers ?
Un métavers est construit autour quatre briques : un monde virtuel persistant, qui peut éventuellement être accessible en réalité augmentée ; la possibilité d’y réaliser des achats virtuels via des cryptomonnaies ou des achats physiques (une paire de chaussures...) ; une décentralisation des paiements et une redéfinition de la notion de propriété (NFT), l'identifiant serait le Wallet ; une dimension sociale qui existe déjà dans certains jeux vidéo en ligne par exemple. Bref une nouvelle dimension propice au « retailtainment ».
Selon vous, les métavers ont-ils un intérêt pour le grand public aujourd’hui ?
La question qu’il faut se poser est la question de l’utilité. Un métavers, une blockchain ou un jeton non fongible (NFT), est-ce quelque chose dont le grand public a besoin ? Pas évident. En tous cas, vous n’avez pas besoin de tout ça pour acheter des habits, un livre, ou des produits high tech. Vous n’en n’avez pas non plus besoin pour visionner un film ou vous amuser. Ou encore pour organiser une réunion de travail. La réalité virtuelle, par exemple, a du mal à se développer dans ses usages grand public. Actuellement, elle sert surtout dans l’industrie et la formation notamment à travers des simulations. Les applications purement commerciales ou marketing, elles, ne sont pas légion... Dans les métavers, des événements éphémères sont créés comme des concerts ou des « party » (Snoop Dogg sur Sandbox), avec de nouvelles scénographies, mais ce n’est pas structurant, on est plutôt sur du jetable. Les applications sont très proches des sujets de marketing événementiel, ça fait du buzz. Sur le sujet du metavers, on est souvent au second degré, à l'instar de la campagne de Heineken et sa bière virtuelle sans alcool qui existe aussi dans le réel, ironie ou premier degré ? La force de cet environnement est de proposer des choses qui n'existent pas dans le réel, là tout est à imaginer pour repousser à nouveau les limites humaines comme les limites du temps et l'espace. Les usages au-delà du gaming sont à imaginer.
Ces univers virtuels sont-ils réellement accessibles ?
Il ne faudrait pas que les manipulations indispensables à la maîtrise de ces environnements deviennent complexes pour répondre à des fonctionnalités de customisation, d’interaction avec les autres ou de création en général (NDLR : voir l’interface du Viewer de Second Life...). Le grand public n’est pas prêt à acquérir les compétences de « gamers » obligés de passer par un apprentissage assez lourd et fastidieux pour performer dans les jeux vidéo. Donc dans un premier temps, la production de contenu sera relativement limitée au geek, cela reste trop compliqué pour le grand public, l'évolution du « nocode » le prouve. Pour que le contenu publié par les utilisateurs (User Generated Content) se démocratise, l’enjeu porte sur l’ergonomie des outils de production de contenu afin d'attirer le grand public. Les marques devront faire du sur mesure, mais à quel prix ?
Mais l’aspect visuel et immersif pourrait être un atout ?
Attention, les rendus graphiques des métavers font un peu rire les pur « gamers » habitués à des environnements visuels très fins dans les jeux compilés et téléchargés sur la console ou l’ordinateur. Or, dans les métavers, nous sommes plutôt proche du dessin animé (Decentraland) ou de Minecraft (SandBox)... De toute façon, pour générer des environnements graphiques de qualité et très immersifs, il faudrait des progrès en puissance côté éditeurs, mais également et surtout des progrès en équipement performant côté utilisateurs. Or la tendance qui se présente à nous est plutôt à la sobriété numérique, à l’écologie numérique, pas forcément compatible avec une course à la puissance informatique. Surtout pour des usages grand public. A nouveau le second degré sera un axe de réussite. Pour les enfants, le rendu Minecraft est fun, il libère l'imagination. c'est le concept qui prime, surtout lorsque des zombies ont dévoré les chèvres de mes enfants ce n'est pas le visuel qui les amuse, mais le gore qui devient fun.
Alors les entreprises ont-elles intérêt à s’y intéresser ?
Certaines marques ont un pouvoir d’attraction très fort, les métavers ont peu d’intérêt pour elles. Les investir doit apporter quelque chose, rentrer dans une stratégie. Et encore, à condition que la marque puisse disposer de sa propre visibilité et pas d’un « template » générique à l’image de la technologie des chatbots, proposée par Facebook. Elle n'était pas assez puissante et n'a pas réellement fonctionné car le paradigme n'était pas vraiment adapté. Le rendre performant demandait des compétences techniques lourdes. De la même manière, tout le monde n’est pas fait pour réussir dans les métavers. Les chatbots qui ont réussi (SNCF) sont ceux qui ont d’énormes bases de données pour son apprentissage. La promesse d’utiliser une fonctionnalité universelle sous une forme générique n’intéresse pas les marques. Le marketing consiste justement à se différencier. Et à proposer une expérience utilisateur intéressante, apportant de la valeur ajoutée. Du chatbot au métavers, ce n’est pas systématiquement le cas, chaque marque devra chercher et trouver ce qui lui convient, ce qui offre de la valeur à ses clients. De plus, aborder ces technologies coûte beaucoup d’argent pour le design et les développements informatiques mettant ainsi la barre du retour sur investissement très haute. D’un autre côté, ces espaces numériques vierges sont à découvrir et à inventer. Le terme de conquête est bien adapté. Les entreprises doivent s’y intéresser sans jamais oublier leur stratégie de marque. Celles qui seront les plus visibles au moment de la création de ce nouveau canal, ont le plus de chance d’être les mieux placées quand les usages seront répandus.
Les métavers ont-ils d’ores et déjà de mauvais côtés ?
Les métavers posent un problème d’éthique. A ce jour, les cryptomonnaies et la blockchain intéressent surtout les spéculateurs. Ces moyens d’échanges de valeur sont utilisés sur le Darkweb et permettent à certains individus de recycler leurs avoirs illégaux. Et pour ceux qui ne s’intéressent pas aux richesses, les métavers sont des lieux où l’on peut faire en virtuel ce que l’on ne pourrait pas faire dans le réel. L’industrie du sexe par exemple, s’en emparera rapidement. Dans nombre de mondes persistants, soit les abus marketing sont rejetés naturellement par une communauté passionnée qui tient à son concept ; soit c'est un peu le Far-West où la promesse de jeu, en apparence ludique, est en réalité d'évoluer dans un espace de non droit, où tout est possible... Comme dans GTA où il est possible de flinguer des personnes âgées ou de fréquenter les barons de la mafia. On s'y donne rendez-vous pour squatter ou échanger discrètement à l'abri des regards. Quels contenus ces utilisateurs vont-ils créer ? Le législateur aura du mal à cadrer ce qui s'y passe, il y aura forcément des dérives comme les polémiques actuelles sur les « fakes news » ou les contenus illicites. Les géants de la « tech » s'y opposeront probablement pour tenter de réguler les usages en exprimant leur proposition de valeur, comme Apple face à Facebook... Le métavers pourra probablement cristalliser les affrontements idéologiques des marques.